Lorsque les conflits éclatent, ou que surviennent des catastrophes naturelles ou encore quand les fuies migratoires augmentent ; des familles entières se retrouvent séparées. Ne pas savoir où se trouvent les membres de la famille est, sans aucun doute, l’une des souffrances atroces qui soient. C’est dans ce contexte que le Comité International de la Croix-Rouge du Burundi, CICR, conjointement avec la Croix-Rouge du Burundi, CRB, mènent une série d’activités de rétablissement des liens familiaux en faveur de ceux qui ont été contrés, pour une et autre raison, de se séparer de leurs proches. Le point de notre journaliste à la rencontre des bénéficiaires du programme de Rétablissement des Liens Familiaux (RLF).
Nul n’ignore qu’en cas des conflits de guerres, crises, migrations et catastrophes naturelles ; plusieurs personnes sont séparées de leurs proches. Des enfants perdent les traces de leurs parents et vice-versa. Tout cela laisse les familles dans des traumas et des fractures intenses. Ces genres des théâtres tragiques ne cessent de peser lourd sur les familles burundaises et celles d’ailleurs.
Pour pallier à tous ces maux ; le CICR et la CRB, via leur programme de « Rétablissement des Liens Familiaux (RLF) », ont mis en place une série d’actions pour écouter, soutenir, et accompagner les familles dispersées afin de maintenir ou rétablir le contact et, ainsi, atténuer les douleurs liées à la séparation de leurs proches.
Quid du Rétablissement des Liens Familiaux
Assuré depuis 150 ans par le CICR et les sociétés nationales de la Croix- Rouge, le RLF est l’un des meilleurs pivots du processus de rétablissement du contact des personnes séparées avec leurs familles respectives. Son objectif stratégique est de rétablir les contacts et réunifier les personnes séparées de leurs familles suite aux conflits armés, catastrophes naturelles, crises humanitaires et autres.
Selon le rapport de la CICR au Burundi, plusieurs personnes et familles ont rétabli leurs liens à l’aide de différents outils que regorge le RLF.
Néanmoins ; Ndoricimpa Livingstone, chargé du département de RLF au CICR du Burundi, s’indigne de la quantité de ces résultats. Pour lui, les chiffres restent insatisfaisants à cause de la méconnaissance dudit programme et des outils qu’il renferme. Il appelle tout un chacun de faire la promotion de ce programme pour que tout le monde en prenne connaissance.
Des bénéficiaires du RLF s’en réjouissent
« J’ai été très contente de voir mon fils de retour avec l’aide de la Croix-Rouge », dit Marie-Félicité Hatungimana
Chérisse Igirubuntu, 19 ans, originaire de la province de Cankuzo, Zone Mugozi, colline Kigende, est l’une des bénéficiaires du programme de RLF.
Cette fille qui a vécu une tonne de traumatismes, après avoir rejoint sa mère dans le camp de Nduta où elle s’était remariée, raconte que sa vie était menacée avant de rencontrer la Croix-Rouge.
« Le mari de ma mère me chicotait brutalement. Il m’a ensuite chassé de la maison en me disant que je ne suis pas son enfant. Le chef de quartier m’a alors aidé à rencontrer la Croix-Rouge. J’ai ensuite envoyé un message Croix-Rouge à ma grand-mère en lui expliquant les conditions dont je vivais et que je voulais rentrer. Elle m’a répondu favorablement. Je me suis inscris et après 4 mois, je suis rentré. J’en remercie donc la Croix-Rouge ».
Même son de cloche chez Gaudence Toyi, sa grand-mère de 52 ans qui l’a accueillie.
«Le jour où j’ai vu le message, je me suis senti triste car elle me racontait les mauvaises conditions de sa vie. J’ai même pleuré. Je l’ai répondue par ce message Croix-Rouge. Elle est ensuite rentrée et aujourd’hui elle m’aide à faire certains travaux de ménage. J’en remercie la Croix-Rouge et ses collaborateurs».
Oness Niyonkuru, 18 ans, originaire de la colline Gisoro, commune Cendajuru, est un autre bénéficiaire du programme de RLF. Victime de la crise qui a secoué le Burundi en 2015, il explique comment il a retrouvé sa famille.
«Quand j’étais dans le camp de Nduta, j’avais la nostalgie de mes parents et mes petites sœurs. Je ne voyais pas comment je rencontrerai encore ma famille. C’est grâce au service « Gahuza miryango » de la Croix-Rouge que j’ai pu retourner chez nous.»
Marie-Félicité Hatungimana, mère de Niyonkuru Oness, témoigne les sentiments qui l’ont caractérisée quand elle voyait Oness de retour.
« J’ai été très contente de voir mon fils de retour. Je pensais qu’il n’existait plus car depuis qu’il était parti; nous n’avions aucune autre trace. Nous avons commencé à avoir de l’espoir quand il nous a envoyé un message Croix-Rouge. Je salue ce service que la Croix-Rouge offre aux familles séparées».
Ce processus de réunification ne se limite pas aux burundais seulement. Le cas de Mbeleche Roda Chantal, une congolaise qui vient de passer 8 ans dans le Camp de Kavumu en commune Cankuzo, en témoigne. Mbeleche Roda dit qu’elle a récupéré cinq enfants dont leur mère avait rendu l’âme, il y a 5 mois. Via le service de RLF, ces enfants ont pu retrouver une famille d’accueil au Congo ce qui a fait réjouir cette dame de 54 ans.
«Leur père les avait laissés ici avec leur mère. Je les ai récupérés après la mort de leur mère. Je suis ravie que le processus de réunification est en cours à travers le service de la Croix-Rouge car ils sont maintenant en contact avec leur oncle qui vont les accueillir», indique-t-elle avec un sourire de gaieté.
«Notre oncle réclame que nous rentrions et nous sommes prêts car nous n’avons plus de parents ici dans ce camp. Je suis vraiment très content d’être au point de retourner chez nous. L’enregistrement est déjà fini, nous espérons que bientôt nous rentrons. », indique Samuel Godefroid, ainé des cinq enfants, avec un air content pour avoir retrouvé les liens avec sa famille restée en RDC.
Ces bénéficiaires ne sont pas les seuls car les services de RLF couvrent tout le Burundi en général et en particulier les provinces frontalières comme Kirundo, Ngozi, Ruyigi, Cankuzo, Rutana et Makamba.
RLF, un programme de bonne réputation mais inconnu
« Auparavant, je ne savais pas l’existence du service RLF », déplore Janvier Rugabanya, chef de sous colline Gituro.
Malgré son célèbre aloi, pas mal de citoyens ne sont pas au courant du processus du RLF.
Janvier Rugabanya, chef de sous colline Gituro, commune Cendajuru, dit qu’il n’était pas au courant de l’existence de ce service jusqu’au jour où les agents de la Croix-Rouge sont venus vers lui pour lui demander où vivent les parents de Niyonkuru Oness.
Cet administratif à la base demande que ce programme soit sensibilisé à travers tout le pays.
Dans une interview accordée aux médias à Ruyigi, Ndoricimpa Livingstone, chargé de ce programme, fait savoir que l’étude faite a révélé que le programme de RLF reste « grec » pour les burundais. Il explique que pour pallier à ce défi, ils ont fait recours aux médias pour que ces derniers vulgarisent cette information. Il appelle les journalistes burundais à s’intéresser à la production des contenus qui relèvent des questions humanitaires car, dit-il, leurs voix arrivent trop loin et touchent la majorité de citoyens.